Les organisations de la société civile du Nord-Kivu ont échangé, du 13 au 15 Août à Goma sur les rôles et les méthodes des processus et mécanismes informels de justice transitionnelle. Objectif, comprendre la justice transitionnelle dans le cadre du projet d’appropriation et leadership communautaire pour une justice transitionnelle transformative au Nord-Kivu et en Ituri mise en œuvre par le consortium Impunity Watch (IW) et Avocat Sans Frontière (ASF).

« Il a été question de partager des connaissances avec les représentants de la société civile mais aussi les victimes sur les processus et mécanismes informels de justice transitionnelle car celle-ci comporte des processus et mécanismes formels c’est à dire qui sont initiés par l’Etat et ceux informels qui sont initiés et mises en œuvre par les acteurs de la société civile et d’autres cadres qui ne sont pas l’Etat » a fait savoir Gentil Kasongo de Impunity Watch qui a organisé cet atelier.

Il indique que l’atelier visait le partage des connaissances sur ce processus informel entre les participants, entre autre les acteurs de la société civile et les représentants des groupes des victimes pour qu’ils puissent aussi amplifier leur participation au processus.

Il insiste que le projet comme il est intitulé, vise l’appropriation et le leadership des communautés. « Généralement des processus de justice transitionnelle sont menés par des institutions étatiques ou parfois internationales mais les communautés sont souvent considérées comme des simples bénéficiaire. Ce projet vise à faire en sorte que les communautés affectées par les violences ne soient pas simplement des bénéficiaires mais qu’ils puissent être également des actrices. C’est-à-dire qu’elles puissent comprendre c’est quoi la justice transitionnelle et puis s’impliquer pour le changement visé par cette justice », martèle Gentil Kasongo.

« Nous attendons, des participants, qu’ils puissent mettre en application ce qu’ils ont appris. D’abord en terme de partage des connaissances c’est à dire qu’ ils contribuent à la sensibilisation et au partage de ce qu’ ils ont appris ici comme notions sur la justice transitionnelle, particulièrement, les processus informels de cette forme de justice mais aussi qu’ils puissent s’engager dans le processus surtout qu’ils ya plusieurs autres activités qui seront menées dans le cadre de ce projet  car FONAREV et les autorités du pays sont aussi engagés sur cette question. Le souhait est que les participants à cet atelier puissent rependre au niveau communautaire ce qui s’organise dans le cas de la justice transitionnelle, et ce, dans tous les territoires, groupements et villes. Qu’ils puissent participer globalement dans la dynamique de justice transitionnelle en RDC » insiste-t-il.

Agnès Balike, habitant du territoire de Nnyiragongo, constate que le processus informel de la justice transitionnelle est très important car, pour elle, « au lieu de se rendre justice, les victimes peuvent se donner au conseil des sages pour une aide afin qu’elles puissent être remises dans leurs droits sans viser l’argent mais en conscientisant dans le système de gagnant-gagnant ».  Elle ajoute que cette justice transitionnelle informelle permet à ce que les communautés puissent régler le plus vite possible les problèmes qui sévissent entre elles.

Comme d’autres participants, Nzabonimpa Lazare, chef d’antenne de « baraza la wazee » de Nyanzale en chefferie de Bwito, territoire de Rutshuru, pense que la forme la plus courante qu’on peut utiliser dans la société est le mécanisme informel. « C’est question de mettre des personnes ensembles quand il ya un conflit au lieu d’approfondir des rivalités liées à des crimes existants dans la société et dans les communautés » dit cet acteur de la société civile qui  pense que cette dernière doit organiser des dialogues, des réconciliations mais aussi mener des plaidoyers et mobilisations de la communauté autour de la justice transitionnelle. « Nous devons aussi promouvoir le droit des victimes, les accompagner psychologiquement. Contrairement au mécanisme formel, le mécanisme informel est un processus qui va rapidement car il ne tarde pas comme les procès  et ici, la victime a droit d’abord à la vérité, au pardon et à la garantie de non-répétition. Ces mécanismes favorisent davantage à la résolution des conflits et les gens restent unis », pense-t-il.

Pour maître Paulin Muliro, Avocat et secrétaire exécutif de CADHO ASBL Beni, au Nord-Kivu, la matière de la justice transitionnelle semble être nouvelle que ça soit dans la société civile que du côté étatique. « C’est quelque chose à encourager. Je pense qu’il faut autant de sensibilisations en faveur des victimes, des autorités et autres acteurs de la société civile pour l’implication effective des vraies victimes dans la thématique », souligne maître Paulin qui croit que la justice transitionnelle n’évoluera pas si les victimes ne sont pas retrouvées. Il ajoute qu’il faut mettre à pied des couches des victimes et que cela se fasse au moins dans chaque milieu où les crimes ont eu lieu. « Cela permettrait à ce que les victimes soient vraiment à l’aise et qu’elles se retrouvent dans leurs propres langues et milieux habituels. Il faut renforcer les structures communautaires pour que la justice transitionnelle soit vulgarisée partout dans les coins et recoins où se trouvent plusieurs victimes car il ya beaucoup des gens qui ignorent cette matière », conclut-il.

Après les trois jours d’échanges, sous la facilitation d’Africa Reconciled (AR) qui est une des organisations de mise en oeuvre de ce projet, tous les participants se sont dits prêt à poursuivre la mobilisation de toutes les couches de la communauté pour que la justice transitionnelle soit effective dans les zones où les crimes graves ont été commis.

Après le Nord-Kivu, Impunity Watch et ses partenaires impliqueront les membres des communautés de l’Ituri dans une activité similaire.

Nanou Kazaku