
Lancée depuis le 24 mars dernier, la campagne de prise en charge gratuite des consultations et traitements au centre hospitalier neuropsychologique « Tulizo letu » arrive à son terme ce Jeudi 24 Avril 2024. Durant un mois, cet hôpital a reçu plus de 700 cas et d’autres demandes sont enregistrées malgré cette clôture liée aux moyens. Dans une interview exclusive accordée à www.sunjan-news.com , Jean Marie Vianney Basabose, infirmier neuropsychiatre au sein de ce centre hospitalier parle du déroulement de cette campagne et des défis auxquels ils font face.
Sunjan-News : Un mois après le lancement de prise en charge gratuite des consultations et traitements, quel a été l’engouement ?
Ir Basabose : l’ampleur du travail est devenu grand car nous sommes maintenant à 716 nouveaux malades en ce mois en plus des anciens que nous prenions en charge bien avant, ce qui nous fait à plus de la moitié des malades que nous recevons par an.
Sunjan-News : Quelles sont les catégories des gens que vous avez reçus en termes d’âge et de sexe ?
Ir Basabose : la plus grande catégorie des gens qui ont consulté sont les femmes car elles représentent 51% des effectifs reçus. Au deuxième volet ce sont les hommes suivis des enfants. En terme d’âge, nous avons les plus jeunes et donc ceux qui ont une vie active et donc entre 25, 35, 40 ans mais aussi les enfants et les adolescents car ils sont aussi plus vulnérables.
Sunjan-News : Quelles sont les pathologies que vous avez trouvées chez les consultés ?
Ir Basabose : nous avons détecté pas mal de problèmes mais c’est le trouble psychosomatique qui vient au premier plan. Il faut noter que ces troubles sont ceux dont les manifestations sont organiques et /ou somatiques mais dont les origines sont psychologiques. Nous avons aussi détecté beaucoup de gens avec un syndrome de stress post-traumatique avec tout ce que tous les problèmes que la ville a connu mais aussi des violences sexuelles basées sur le genre. Nous avons aussi reçu des malades avec la dépression. Et pour les enfants, plusieurs présentaient des crises épileptiques multiformes et ceux qui avaient des troubles de développement.
Sunjan-News : Quelles seraient les causes de toutes ces maladies ?
Ir Basabose : vous savez que la maladie mentale n’est pas comme la maladie physique comme la malaria où on a le plasmodium et on parle de la malaria. Ici, on parle des facteurs qui interagissent entre eux. Il ya donc des facteurs d’ordre physique qui peuvent avoir d’impact sur la vie mentale mais aussi l’utilisation des drogues, de l’alcool, du chanvre et certains médicaments car dans certaines circonstances il ya l’utilisation abusive des médicaments. Avec les stress que les gens traversent certains se réfugient dans la prise de l’alcool et d’autres drogues comme une source de soulagement pourtant un refuge erroné parce qu’il ne répond pas au problème. En dehors de ça, il ya des problèmes d’ordre social, ceux liés à notre environnement qui est hostile, qui ne fait pas bien vivre. Voilà des éléments qui interagissent jusqu’à créer des problèmes de santé mentale.
Sunjan-News : Vous avez reçu une mare-mare de gens, comment s’est passée leur prise en charge ?
Ir Basabose : La prise en charge a été non seulement médicale mais aussi globale car nous avons usé des approches psychothérapeutiques, socio-thérapeutiques mais aussi l’approche de la famille. Ce qui fait que l’approche était pluridimensionnelle selon le cas.
Sunjan-News : Quelles sont les recommandations que vous faites aux gens qui ont trouvé soulagement et solution à leurs problèmes et qui peuvent s’ils ne font pas attention rechuter ?
Ir Basabose : chaque malade qui est passé à eu des recommandations individuelles selon son cas car chacun a ses problèmes et la manière dont il cherche à les gérer. Il ya des problèmes pour lesquels il faut un suivi qui n’est pas assez long mais aussi d’autres qui demandent un suivi assez long. Globalement ce que nous pouvons dire est que nous avons, entant qu’africain un style de vie résilient et donc nous encourageons cette vie communautaire, une vie où il ya des interactions, où les gens cherchent toujours à apporter un soulagement à la souffrance des autres. Nous demandons aussi à ceux qui ont la sécurité dans leurs attributions de faire de leur mieux pour que la population vive dans la quiétude car le mal est profond.
Sunjan-News : C’est la fin de la prise en charge gratuite, ya-t-il d’autres personnes qui arrivent et que comptez-vous faire face à leur demande ?
Ir Basabose : les gens sont encore nombreux. C’est pour nous une première expérience, ce qu’il faut dire est qu’on a eu des difficultés car le centre n’a pas assez de moyens pour continuer cette activité de prise en charge gratuite, qui donne un manque à gagner pour le centre mais nous l’avons faite quand même car il fallait soulager cette population et faire un diagnostic communautaire des problèmes et nous pensons qu’avec la première expérience il ya des leçons à tirer. C’est aussi un moment pour nous de faire u plaidoyer auprès d’autres organisations pour qu’elles soulagent ces populations. Nous sollicitons aussi un appui pour que nous puissions continuer avec cette activité qui est tant attendue par la population car à voir l’engouement des malades et les problèmes qu’ils présentent, je pense qu’il ya un grand travail à faire.
Sunjan-News : Que dites-vous aux communautés qui vivent dans des zones à conflits et où les guerres sont récurrentes ?
Ir Basabose : Que ces personnes évitent la panique et comprennent que les problèmes sont là mais il ya toujours moyen de trouver de l’aide. L’aide entre nous d’abord et si le problème est profond de consulter les structures qui sont proches mais aussi d’aller vers d’autres organisations qui interviennent pour que les problèmes, les stress soient atténués et qu’elles ne cherchent pas à résoudre les problèmes elles-mêmes mais qu’elles trouvent de l’aide pour bien poursuivre la vie.
Sunjan-News : Fin de la campagne, quels sont les sentiments qui vous animent ?
Ir Basabose : C’est un sentiment de satisfaction d’un côté mais aussi celui d’un vide à combler de l’autre côté parce qu’il faut toujours continuer à prendre en charge ces personnes qui sont vulnérables sur le plan non seulement de la santé mais aussi sur le plan socioéconomique.
Je fais un appel à tous les humanitaires qui interviennent et toutes les structures qui ont un volet de prise en charge santé mentale et psychosociale en faveur de la population de se mobiliser pour que nous puissions donner soulagement à la population mais aussi aux bailleurs des fonds d’appuyer des structures et organisations qui travaillent dans ce domaine à l’occurrence le « centre hospitalier neuropsychiatrique Tulizo letu » pour que nous puissions continuer à apporter soulagement à la population.
Propos recueillis par St Janvier Zihalirwa